J’ai eu la chance de croiser à plusieurs reprises la route de Angély Bouillot, star du kitesurf big air qui a débuté par le kitespeed (kitesurf de vitesse). La dernière fois que nous avons brièvement échangé en face-à-face, c’était lors du Lords of Tram 2022 au Barcarès, que j’étais venu couvrir pour Kiteboarder. Mais je connais Angély depuis pas mal d’années déjà, je l’avais en effet rencontrée au Mondial du Vent de Leucate 2015 si ma mémoire est bonne.
Pour le plaisir, voici deux interviews que j’ai réalisées avec elle ces dernières années, pour Kitenews.fr (2016) puis Kiteboarder-mag. com (2018) !
Rappelons qu’Angély Bouillot fut la première femme à participer au mythique Red Bull King of the Air, en 2020 (depuis que l’évènement est organisé à Cape Town, Afrique du Sud).
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Angély Bouillot : « J’aimerais participer au Red Bull King of the Air ! » (Kitenews, 2016)
Fraîchement sacrée championne du monde de kitespeed après les deux étapes disputées à Leucate, mi-avril, et à Martha’s Vineyard, Angély Bouillot garde les pieds sur terre. La Leucatoise est déjà tournée vers d’autres projets, notamment le big air, et pose un regard franc sur ce qu’il lui reste à accomplir. Interview !
- Quand et comment as-tu découvert le kite ?
J’ai essayé pour la 1ère fois à 15 ans, par l’intermédiaire de mon prof de planche à voile à Hyères. J’ai ensuite fait un stage avec ma mère et mon frère en Turquie, et de là j’ai tiré mes premiers bords, vers mes 15-16 ans. J’avais adoré, j’ai trouvé ça génial et j’ai délaissé le windsurf pour le kite !
- Qu’est ce qui te plait le plus dans ce sport ?
Ce que j’adore dans ce sport, c’est que tu es libre d’aller où tu veux, tu as juste besoin de vent. Tu es autonome, il y a une grosse sensation de liberté quand tu prends le kite. Tu peux naviguer là où tu en as envie, j’adore cette sensation. Pas de moteur, juste un kite, un cerf-volant et c’est parti…
- A quel moment t’es-tu dit : c’est ce sport que je veux continuer à pratiquer ?
Il y a 3 ans, lorsque j’ai participé à mon premier Mondial du Vent. J’étais auparavant dans un milieu artistique, j’adorais ce milieu mais cela faisait des années et des années que l’on me disait de me mettre à la compéte. Cela ne m’intéressait pas à l’époque, mais il y a 3 ans, j’ai réalisé que c’était maintenant ou jamais. J’avais 25 ans, j’ai décidé de me lancer et de voir où cela allait me mener…
- Peux-tu raconter tes débuts en kitespeed ?
J’ai débuté le speed dans le cadre d’une préparation au Mondial du Vent. Je m’étais entraînée un mois en mars, le Mondial était programmé en avril. On m’avait prêté une board, j’ai appris petit à petit et j’ai terminé troisième de l’évènement.
- Quelles sont les sensations que tu ressens lors des runs de vitesse ?
Quand le vent est vraiment très fort, c’est vraiment agréable, j’adore aller vite. Je faisais avant du ski de descente, on retrouve ces sensations de vitesse sur l’eau. J’ai un peu de mal à mettre des mots dessus. Cela coupe un peu le souffle, à mes débuts je faisais tous mes runs en apnée, aujourd’hui j’arrive à maîtriser ma respiration. L’objectif est de gagner un maximum de vitesse, c’est vraiment une super sensation. A la fin du run, tu commences à ne plus avoir de cuisses, il faut tenir ces 500m, on ride 1h30 quatre fois par jour… Mais tu dois oublier la fatigue physique, à ce moment tout se joue au mental, tu avances sans réfléchir !
- Quels sont tes points forts en tant que kitesurfeuse ?
J’ai toujours été dans le milieu de la glisse depuis toute petite, avant j’étais en ski-études. La vitesse ne m’a jamais vraiment fait peur et j’ai pratiqué beaucoup de sports extrêmes, je pense que c’est un atout. Cela m’a aidé pour le speed et pour le kite.
- Quels souvenirs gardes-tu de ton titre de championne de France de kitespeed 2014 devant Charlotte Consorti, qui avait marqué les esprits ?
J’étais assez fière, j’étais contente de moi ! Quand tu te fixes un but en te disant : « il faut absolument que j’y arrive » et que tu atteins cet objectif, c’est la satisfaction à l’état pur qui domine.
- Comment as-tu vécu la compétition à Martha’s Vineyard ? Tu as régulièrement terminé devant plusieurs mecs…
Je l’ai vécu comme un bon apprentissage. Heureusement pour moi qu’il y a eu du vent fort durant trois jours, c’est ça qui m’a permis de gagner, car il y a eu aussi du vent très faible à certains moments. Or, je ne fais jamais de speed dans du vent aussi faible. Je pense que je n’avais pas fait le bon choix de matériel, beaucoup de riders étaient en aile à caissons, qui remontent bien mieux au vent. Mes kites sont très bien, mais je pense qu’il m’aurait également fallu des ailes à caissons et une planche de speed un peu plus volumineuse. A mes yeux, j’aurais pu faire encore mieux avec ce genre de matos. Il ne me semble pas avoir déjà navigué dans du vent aussi carré, je me faisais tirer par l’aile, parfois je n’arrivais pas à boucler le run, il fallait trafiquer les ailes pour qu’elles avancent mieux en bord de fenêtre… Cela dit, j’ai trouvé la compète moins physique qu’au Mondial du Vent, puisqu’à Martha’s Vineyard un run durait 250m et non pas 500m. Batailler dans le vent faible est néanmoins assez épuisant nerveusement, j’ai eu davantage de sensations au Mondial du Vent. Mais c’est un plaisir de naviguer avec des pros, avec les meilleurs dans cette discipline, alors que Marine et moi sommes toutes novices dans le speed. Cela aide de les côtoyer, de regarder leur positionnement, de discuter avec eux… Ils sont de bon conseil.
- L’état d’esprit semblait en effet excellent entre tous les riders… C’est une grande famille non ?
Oui, l’ambiance était assez familiale, d’ailleurs Rob Douglas et sa famille nous ont logés durant les 15 jours d’épreuve, ils nous ont prêtés une petite ferme. C’était vraiment sympa de leur part, cela évitait de payer des logements, qui coûtent assez cher là-bas. Je suis partie avec Sylvain Hoceini et Marine Tlattla, je m’entends très bien avec eux, on était un peu une bande de potes qui s’affrontaient. J’aurais cependant aimé qu’il y ait plus de filles, afin de me battre comme d’autres nanas, comme Charlotte (Consorti, ndlr). J’ai vraiment trouvé dommage qu’elle ne soit pas là. Avec Marine, nous sommes très amies, c’était assez étonnant de se battre l’une comme l’autre. Je remercie d’ailleurs Sylvain Hoceini, c’est un ancien du speed et il m’a vraiment donné pas mal de conseils, tout comme à Marine. Il nous coachait un peu, et heureusement qu’il était là, c’est vraiment cool de sa part.
- Tu es désormais championne du monde de kitespeed, que représente ce titre à tes yeux ?Une consécration ?
Comme je le disais tout à l’heure, je me suis mise au speed il y a 3 ans, le but était de devenir championne du monde, l’objectif est atteint et je peux passer à autre chose. J’ai envie d’évoluer dans le kite, que ce soit dans le speed ou le Big Air. J’ai quand même l’impression que le speed est un peu en train de mourir, personne n’en parle. J’ai donc choisi de m’axer davantage sur le big air.
- Tu pratiques le big air depuis longtemps ?
Oui, il était à la base du kite, désormais c’est plutôt le déhooké, le wakestyle. Le public adore toujours le big air, j’aimerais participer à certaines compètes comme le Red Bull King of the Air, qui est la compète la plus médiatisée. Pour cette année, ça ne sera sûrement pas possible, j’ai une nouvelle vidéo mais il me manque des rushes et il n’y a pas un pet de vent depuis 10 jours ! Je ne pourrai donc sans doute pas être sélectionnée pour le contest.
- Le King of the Air semble un contest important à tes yeux…
Oui, j’aimerais bien montrer ce que je sais faire. Je trouve cependant dommage qu’aucune fille ne participe à ce genre de compétitions. Personnellement, j’ai envie d’y participer pour prouver ma valeur, mais aussi pour gagner ma vie dans le kite, car ce n’est pas possible avec le speed. Pour le moment, je n’ai quasiment aucun sponsor, personne ne m’aide financièrement, j’aimerais me donc me faire un peu plus connaître, avancer et vivre de ma passion pour le kite.
- Considères-tu que tu as encore une belle marge de progression, en speed comme en big air ?
Oui oui, j’ai encore tout à faire, et c’est pour cela que je vais partir à l’étranger car ici à Leucate, je sature, je n’arrive pas à progresser énormément. Je suis partie cet hiver au Brésil et j’en ai senti les bienfaits, j’ai donc décidé de migrer vers l’Afrique du Sud pour quatre moi. Cela devrait me faire beaucoup de bien, il y aura du vent et je pourrai faire du big air ! J’atterris à Cape Town, je vais louer dans la« Mystic House », une guest house de riders située face au spot du Red Bull King of the Air. Je compte faire une belle vidéo en Afrique du Sud, pour être sélectionnée pour le prochain KOTA. J’espère aussi me faire un réseau, rencontrer des personnes susceptibles de m’aider à avancer dans le kite.
- Tu as un côté artiste bien développé, tu crées notamment des fringues avec des vieilles ailes de kite je crois. Peux-tu m’en parler un peu plus ?
Cet été, j’ai en effet voulu commencer à lancer une marque, j’ai ramené du tissu boardshort noir du Brésil, et j’ai découpé mes ailes de kites pour mettre un peu de couleur. J’ai fait du patchwork que j’ai apposé sur mes shorts. Je comptais gagner ma vie avec ça, mais faire des patchworks est quelque chose de très long et qui n’est pas assez rentable. Mais c’est un projet qui est dans ma tête, je dois juste débloquer du budget. A la base, je faisais également des sculptures en métal. Je pense que ce côté créatif me sert dans le kitesurf, j’aimerais en tout cas vraiment pouvoir allier art et kite !
- Comment vois-tu ton avenir, t’es-tu fixée de nouveaux objectifs ?
J’aimerais participer à plusieurs compétitions internationales de big air, et trouver des financements pour mettre sur pied une tentative de record du monde de vitesse en Namibie. Il me faudrait 10 000€ de budget, afin de partir pour au moins un mois et ne pas rater les conditions de vent. Je ne sais pas quel sera mon avenir dans le speed, mais j’aimerais beaucoup devenir la femme la plus rapide sur l’eau !
[Interview] Angély Bouillot : « Ce sont les conditions extrêmes qui me passionnent » (Kiteboarder, 2018)
Voici une rideuse qui aime s’envoler haut, très haut ! Angély Bouillot a fait du big air sa discipline de prédilection, celle qui la fait vibrer au plus profond de son être. Et cela paye, puisque la Leucatoise a récemment remporté le Full Power Kitefest, sur le spot de Balneario (Tarifa). Une belle occasion pour Kiteboarder d’interroger Angély Bouillot, avec le big air en fil rouge ! Interview...
- Angely, tu es une spécialiste du big air. Peux-tu rappeler comment tu en est venue à pratiquer cette discipline ?
C’est venu naturellement, comme beaucoup de personnes. Le rêve de s’envoler dans les airs est l’un des plus enivrants ! Le fait de pouvoir avoir la chance de le réaliser grâce à un cerf-volant est juste extraordinaire…
- Qu’est ce qui te plaît le plus dans la pratique du big air ?
Il s’agit de se lancer, tout simplement, sans penser à ce qui va suivre. Seul le saut, accompagné de l’extase de la chute libre, compte.
- Comment te définirais-tu en tant que rideuse ?
Une rideuse plutôt sauvage. Plus les conditions sont fortes, et plus je suis amenée à poser mon cerveau sur le bas-côté avant d’aller à l’eau. Malheureusement, je ne le retrouve pas toujours ! Ce qui me donne un style, disons, engagé.
- Y a t-il des rideuses ou riders qui t’inspirent en big air ?Il n’y a pas vraiment une personne en particulier. A mes yeux, tous les riders sont inspirants, avec un style propre à chaque tempérament.
- Tu viens de remporter un contest big air à Tarifa. Comment s’est déroulée ta compétition?
Dans l’ensemble, cela s’est très bien passé car l’esprit était plus amical que compétitif. L’atmosphère était réellement détendue, c’était une très belle journée !
Malheureusement, il n’y a pas eu les conditions extrêmes que j’espérais, mais cela reste une très bonne expérience. Cela me prouve que j’ai un manque d’expérience dans le vent léger…
- Que représente le KOTA à tes yeux et vas-tu tenter encore ta chance cette année ?
Le Red Bull King of the Air est mon objectif actuel, et de le réaliser serait un aboutissement. Ce sont les conditions extrêmes qui me passionnent, et le KOTA convient à mes attentes.
Je serais honorée de pouvoir motiver la gent féminine à participer à ce genre d’événements.
- Ton programme et tes objectifs sportifs à venir ?
Je pars le 22 novembre en Afrique du Sud, pour trois mois d’entraînement… Avec la ferme intention de réaliser une vidéo, qui me permettra peut-être d’être sélectionnée au MégaLoop Challenge !
- Le mot de la fin ?
Je remercie toutes les personnes qui me soutiennent et qui croient en moi. Ma famille, mes amis et bien sûr mes sponsors : ANEO-Conseil avec Pierre Sinodinos (merci à lui pour son écoute !), CORE Kiteboarding, We Ride et mon club, le KSL.
Et merci à David d’être un super coloc, qui ramène toujours des légumes bio !
Crédit photo de Une et ci-dessous : Thomas Burblies

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