Navigatrice française passionnée par l’univers de la course au large, Noémie Catalano s’est lancée depuis quelques années dans un projet d’envergure. La Lorientaise participera ainsi, en septembre 2025, à la Mini-Transat, traversée de l’Atlantique en solitaire sans assistance. Noémie Catalano s’est confiée en interview pour le blog !
–Noémie, peux-tu te présenter en quelques phrases aux lecteurs du blog ?
Je m’appelle Noémie, je suis navigatrice, j’ai 29 ans et j’ai grandi dans le sud-ouest de la France, à Bordeaux. J’ai fait toutes mes études là-bas et je suis désormais basée à Lorient, en Bretagne. J’ai comme objectif de traverser les océans à la voile, en participant à des courses et en étant donc skipper de courses au large. Je vais prochainement participer à la Mini-Transat, une traversée de l’Atlantique en solitaire, sur un petit bateau de 6m50.
– De quelle manière as-tu découvert le monde de la voile ?
J’ai découvert la voile à 9 ans, sur le bassin d’Arcachon. Mes parents m’avaient inscrite à des stages de voile, l’été. J’ai ensuite plus spécifiquement découvert en 2018 l’univers de la course au large. J’avais alors été stagiaire en communication chez OC Sport, une entreprise qui organise la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro. En me rendant aux Antilles pour suivre les arrivées des skippers, je me suis dit : « il faut que ça soit moi, un jour, qui vive ces émotions-là ! » C’est à partir de ce moment que j’ai voulu vraiment me lancer dans la course au large.
– Qu’est-ce qui te fascine le plus dans cet univers de la voile, et de la course au large en particulier ?
Ce n’est jamais anodin de traverser un océan, que ce soit en équipage, en solitaire ou quoique ce soit. Cela relève de l’exploit. Par ailleurs, une fois en mer, tu te transformes véritablement. Tu n’es plus un humain, tu es un animal sauvage complètement différent de la personne que tu peux être à terre. Il faut vraiment puiser dans ses ressources les plus profondes, se dépasser. Tu vas à chaque fois un peu plus loin que ce que tu aurais pu imaginer être capable de faire… Et ensuite il y a toutes les émotions que la course au large peut procurer, aux départs, aux arrivées, qui sont assez dingues.
– A quel âge as-tu commencé à participer à tes premières courses ?
J’ai fait quelques courses locales quand j’étais jeune, pour m’amuser avec mes amis. Lorsque je suis revenue de la Route du Rhum et de la Solitaire du Figaro en 2018, j’ai pris conscience que si je voulais faire de la course au large et progresser, je devais participer à des compétitions. Je me suis donc alignée sur des régates en Open 5.70, un bateau semi-habitable. J’ai ensuite directement participé à mes premières courses en solitaire, sur mon bateau. Je suis attirée par la course au large en solitaire car ce type d’épreuve permet de se prouver que l’on sait gérer son bateau, que l’on sait naviguer en autonomie, que l’on est un bon marin. Ne pas se reposer sur quelqu’un, réaliser quelque chose vraiment toute seule, cela me rend fière de moi !
– Quels sont tes points forts, à tes yeux, en tant que navigatrice ?
Mon principal point fort est ma force de travail. Je suis très sérieuse, je travaille beaucoup, je me donne à 300% pour mon projet. J’investis beaucoup d’énergie pour progresser, pour m’occuper de mon bateau et m’occuper de mon projet avec mes partenaires… Quand on met de l’énergie et que l’on est passionné, forcément ça marche ! On fait bien les choses et les gens le voient.
–Je crois que tu as été impliquée dans le Vendée Globe 2024-2025. Comment cela s’est-il mis en place ?
J’ai été contactée par l’organisation du Vendée Globe, pour gérer les réseaux sociaux de la course. Cette année je suis à 100% sur mon projet, mais auparavant j’étais freelance en communication. Les organisateurs m’ont dit qu’ils cherchaient quelqu’un pour présenter quelques chroniques météo, pendant l’émission consacrée au Vendée Globe. J’ai accepté car il s’agissait d’une superbe opportunité pour moi. J’ai donc travaillé pour le Vendée Globe tout en m’entraînant à Lorient, puis j’ai ensuite suivi la course tout l’hiver, jusqu’à l’arrivée du premier.
– Quel bilan as-tu tiré de ta participation active à ce Vendée Globe ?
Que je voulais faire le Vendée Globe (rires) ! En fait je ne sais pas, mais c’est vrai que cela fait rêver. Je ne m’y étais pas vraiment intéressée avant, c’est une course qui se déroule loin. Vivre cela de l’intérieur m’a procurée les mêmes émotions que la Route du Rhum et la Solitaire du Figaro, cela fait vibrer. Me retrouver sur les pontons à un mètre du skipper, avant son départ pour son tour du monde, et voir de la fierté dans les visages de son équipe, voir de l’émotion dans les visages des proches… Je me suis dit qu’un jour, il fallait vraiment que je vive ça ou que je fasse vivre ça à mon équipe et à mes proches. J’ai découvert cette course à cette occasion, et c’était quand même incroyable.
– T’es-tu identifiée à certains navigateurs ou navigatrices, ou as-tu été marquée par certaines histoires de course ?
Le profil qui se rapproche le plus du mien est sûrement celui de Clarisse (Crémer, ndlr), qui avait initialement une formation dans le marketing, comme je peux l’avoir. Elle est issue du monde de l’entreprise et moins de la voile pure. Je m’identifie donc beaucoup à elle. Je pense aussi à Fabrice Amedeo, autre participant du dernier Vendée Globe et qui est très engagé en faveur des océans. Mon bateau est aux couleurs de la Fondation de la Mer, je suivais donc sa course de près.
Le fait d’avoir été au cœur du Vendée Globe me donne l’envie d’y participer un jour, mais il faut que je progresse dans un premier temps, que je fasse grandir mes capacités à gérer des projets, que j’ai la capacité à gérer un bateau aussi gros… Il faut également bien s’entourer, et il y a forcément l’aspect sponsors qui rentre en jeu.
– Tu t’es lancée depuis deux ans dans un challenge d’envergure. Tu comptes ainsi participer en septembre 2025 à une Mini-Transat, avec au programme une Traversée de l’Atlantique en solitaire sans assistance, sur un bateau de 6m50. Qu’est-ce qui t’as poussée à te lancer dans cette aventure en particulier ?
La Mini-Transat est une course de légende, beaucoup de grands skippers sont passés par là. C’est une première étape pour rentrer dans la course au large, et pas des moindres. Participer à la Mini-Transat implique quasiment trois ans de navigation, d’entraînements, de participations à des courses etc. Ce sont trois années très intenses, on ne participe pas à la Mini-Transat comme ça, il faut se qualifier.
Quand je me suis décidée à me lancer dans la course au large, et que j’en ai parlé autour de moi, beaucoup de gens m’ont dit de faire la Mini-Transat, parce qu’elle constituait un premier pas idéal.
Cela m’a poussée à me lancer dans ce projet et, une fois que je l’ai eu en tête, je voulais vraiment le réaliser ! La Mini est une course parfaite, cela reste accessible assez facilement avec de premiers partenaires financiers. Le bateau reste simple, tu peux tout faire toute seule. La Mini-Transat est par ailleurs autant de la performance que de l’aventure. J’y suis allée, à l’origine, vraiment dans une optique d’aventure.
–Quelles ont été les étapes validées jusqu’à présent ?
La première étape était d’avoir un bateau, je l’ai donc fait construire. Il me fallait ensuite avoir des partenaires pour financer le projet, j’ai alors trouvé des sponsors qui me suivent pour cette aventure. La troisième étape était de maîtriser le bateau (sourire), et donc de s’entraîner. Lors de la première année de ma préparation, j’ai tout d’abord fait des courses en double pour prendre confiance. A la fin de ma première année, j’ai réalisé ma qualification hors course, où l’on part 1 000 miles en solitaire faire un parcours entre Lorient, l’Irlande et les Sables d’Olonne. J’ai ainsi navigué sept jours toute seule sur mon bateau.
C’était une grosse étape validée. Les années suivantes, j’ai alterné entre courses et entraînements. Pour prendre part à la Mini, il faut comptabiliser 1 000 miles hors course (qui constituent la qualification) et 1 500 miles en course. C’est ce que j’ai réussi à faire.
– Quels vont être les préparatifs à venir dans le cadre de cette Mini-Transat ?
Je vais participer à quelques courses en solitaire, continuer à préparer le bateau techniquement et préparer le ravitaillement, la nourriture, la pharmacie, la formation météo etc.
-Si cette Mini-Transat est un succès pour toi – ce que je te souhaites -, serais-tu intéressée par participer à d’autres Mini-Transat ou te projettes-tu sur d’autres courses ?
Je suis très contente de participer à la Mini, mais je pense qu’après j’aurai envie de découvrir autre chose, afin de continuer à grandir. L’année prochaine, l’objectif est de passer en Figaro, afin de participer à des courses en Figaro. J’adopterai le même schéma que pour cette Mini-Transat : une première année avec surtout des courses en double, et une deuxième année où j’aurai pour objectif de m’aligner sur la Transat Paprec, transat en double mixte obligatoire entre Concarneau et Saint-Barthélemy, sans escale.
– En quoi consistent tes entraînements pour la Mini-Transat ? As-tu un coach avec toi ?
Je m’entraîne au Pôle de Lorient Grand-Large, un collectif qui rassemble plusieurs coureurs. Notre entraîneur s’appelle Tanguy Leglatin, il coache des skippers de Lorient, du Mini à l’IMOCA (ceux qui participent au Vendée Globe). Tanguy exerce depuis de nombreuses années, il est super compétent. On fait des entraînements à la journée, il nous fait faire des parcours, des tests de vitesse, ou encore des entraînements offshore, où l’on part une nuit ou deux avec le bateau.
-Et en termes de préparation mentale ?
J’ai effectivement un préparateur mental depuis janvier. J’ai des problèmes de confiance en moi et suis de nature assez angoissée. En mer, je ne suis pas du tout stressée mais à terre, je me questionne souvent sur mes aptitudes à réussir. Mon préparateur mental m’aide donc à gérer ça, et à trouver des méthodes pour que j’aie davantage confiance en moi. C’est la clé pour que je progresse.
– Quels objectifs t’es-tu fixée pour cette Mini-Transat ?
L’objectif est un peu découpé en plusieurs choses. Le premier objectif est de réussir cette traversée de l’Atlantique en solitaire. C’est un sport mécanique, il peut donc se passer plein de choses. Ensuite, le deuxième objectif est de prendre du plaisir. Je veux arriver aux Antilles, sur les pontons, en étant fière de la manière dont j’ai navigué et dont j’ai géré mon bateau, de A à Z. Le fait de m’entraîner à Lorient a ajouté une partie performance, que je n’étais pas venue vraiment chercher au départ. Comme je le disais à des amis, je vais chercher à aller le plus vite possible en permanence, faire de belles trajectoires et avoir une stratégie assez efficace… et ne pas faire de grosses erreurs qui pourraient générer de la casse sur mon bateau. Si je fais ça, je pense que la performance sera à la hauteur de mes attentes.
–Quelles seront les principales difficultés à gérer, notamment sur le parcours ?
Il y aura plusieurs points de vigilance. Lors de la première étape, il y aura un front à traverser, c’est-à-dire une zone avec beaucoup de vent. Il conviendra donc de la traverser sans encombres et sans faire de grosses erreurs. J’ai déjà fait ça et cela devrait aller.
Le deuxième aspect, que je vais un peu plus découvrir lors de cette Mini-Transat, c’est le fait de devoir gérer les grains, de gros nuages qui se déplacent et qui génèrent beaucoup de vent d’un coup. Ils seront davantage présents durant la deuxième étape. Plus je navigue et plus je vais être à l’aise sur le bateau, et plus je saurai réagir en toutes circonstances.
– Quelque chose à ajouter ?
Je dirais que si vous avez l’envie de faire quelque chose, que ce soit un projet, une aventure etc, il faut travailler pour. Si l’on vous dit que c’est une mauvaise idée, il faut foncer car cela veut dire que c’est forcément une bonne idée. Il faudra cependant travailler encore plus, car ce ne sera pas quelque chose de facile à atteindre !
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Crédit photo de Une : NOVOCORP
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